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Molecular Dance Performative practice 

Les Repérages de Danse à Lille 2010

Publié  25 mars 2010 dans 

Les Repérages de Danse à Lille 2010. 

Les Repérages de Danse à Lille 2010. Pour cette quinzième édition des Repérages, Catherine Dunoyer de Segonzac programmatrice de Danse à Lille accompagnée du réseau des CDC (PSO) du CND et de  scènes internationales qui ont pour mission de promouvoir et de diffuser la jeune chorégraphie contemporaine nous offraient sous la forme d’un voyage au cœur de la nouvelle création en danse, un panel de quinze pays et vingt compagnies pour une programmation marathon sur 6 dates et 4 lieux en région Lilloise puis, pour une première expérience  en relais avec Charleroi Danse en Belgique.  Si le public de ce festival est majoritairement composé de professionnels,  programmateurs, journalistes et critiques, chorégraphes et danseurs; il n’en est pas moins accessible au public (cela pour un budget modéré et très abordable).  C’est dans ce cadre que nous nous sommes inscrits à ce festival au risque et d’un surmenage spectaculaire et  d’une indigestion de la danse. Si le terme d’émergence en tant que pensée nouvelle de la chorégraphie et de sa propagation dans le domaine de la scène est aujourd’hui commun, il n’en reste pas moins difficile pour de nombreuses jeunes compagnies (à noter que les chorégraphes et danseurs ne sont pas obligatoirement jeunes) d’avoir la possibilité d’être « repéré » compte tenu du nombre exponentiel de celles-ci (le milieu présentement très hostile de la culture ne rebute apparemment pas les vocations artistiques).   Cela étant dit, l’objet de cette chronique n’est pas de paraphraser ce que la presse spécialisée et les revues professionnelles ont développé sur ce sujet ni, de vous donner une revue de presse sous forme de lecture critique de chaque spectacle, ce que nous aurions aimé pouvoir faire mais qui s’avère lourd et contraignant tant pour le rédacteur (amateur et travailleur dans un tout  autre domaine) que le lecteur (même confirmé)[2] . 

Aussi nous tenterons dans cet article de distinguer et d’analyser les «  tendances » et  modes de représentations qui composent  aujourd’hui le paysage de la danse contemporaine. Danse Danse à Lille, Repérages : où il est bien question de danse ! Mais où en est la danse ? En premier lieu Lille-Dicidanse s’attache (sans prétention mais de manière synthétique)  à tenter de redéfinir ce que le terme danse signifie, en effet compte tenu des réactions à la réception de certains  spectacles tant  par les professionnels que par les spectateurs  lambda qui composaient le public de ce festival, le spectre de la  question de la «  non danse » qui nous semblait pourtant désuète et obsolète hante toujours les plateaux.  Certes, une esthétique de la danse et du beau geste de nos jours réservée à une forme académique persiste sur les scènes traditionnelles tels les Opéras et les grandes scènes nationales comme des revues de fin d’année des écoles de danse. Les  faux débats et polémiques sur ce sujet  alimentent sans cesse la chronique de nos quotidiens régionaux en manque de « maîtres » sous la dent et en mal de satisfaire l’ignorance ambiante.[5] 

De manière concrète et afin d’illustrer ce propos avec rigueur et pertinence nous posons en corrélation les deux propositions suivantes : SYMPHONIE POUR UNE DISSOLUTION[6] –proposée par le Luxembourg interprétée et chorégraphiée par Camille Mutel et la Pièce ANTICORPO[7]-proposée par le Portugal interprétée et chorégraphiée par  João Costa. Non pas que ces deux pièces aient été les plus marquantes de ce festival (il est un peu tôt, il n’y en a pas pour le moment qui m’ait plus impressionnée que d’autres mais, pour cela il faut le temps de digérer…), mais de part leurs écritures et esthétiques qui si elles sont bien différentes l’une de l’autre ont en commun le mode de représentation du solo de l’interprète par le chorégraphe.  Cette forme redondante de l’autobiographie dont l’époque privilégie l’individualisme et le narcissisme ambiant et en favorise la propagation, n’en est pas moins le vestige d’une vision romantique de la mission de l’artiste comme étant celui  qui éclaire et instruit. Symphonie pour une dissolution traite de « la fin de la comédie féminine ». 

  Camille Mutel est une jeune chorégraphe dont la formation éclectique et le rigoureux travail de danseuse signent une danse à la grande technicité et un travail du corps «  miracle par excellence » que la discipline du Butô a forgé. Nous sommes littéralement aspirés  par la gestuelle issue d’un  travail profond sur le creux et le vide dont la respiration écrit la partition et,  d’un théâtre expressionniste  de la répulsion et  de la convulsion. Cependant, en voulant imposer à cette technique une dramaturgie et un code de jeu réaliste,  psychologique et autobiographique, la présence métaphorique des accessoires (gigantesque  hameçon menaçant d’harponner le sexe de la jeune fille, et énorme poulpe aux tentacules phalliques gesticulants) qui alimentent cet effet dramatique nuit à la qualité d’une danse minimaliste de l’intériorité qui relie le corps à l’esprit. Certes le Butô représente une exploration de soi et se construit souvent  sur des corps meurtris,  ici la question du viol et de la souillure sont bien mis en exergue mais, de manière trop suggestive. Les effets scénographiques outranciers et séducteurs qui arguent la fascination nuisent à l’esthétique d’un corps dénudé et exhibé sur lequel la violence des fantasmes sexués masculins se pose à la limite d’un regard pornographique  et spectaculaire tels ces combats de catcheuses dont le public télévisuel est si  friand. La question de la performance se pose par le caractère d’intimité et de confession qui  frappe cette pièce dont on se demande si elle est autobiographique mais, la distance nécessaire, le filtre de la poétique de la scène et la magie des effets qui privilégient l’imaginaire du spectateur font défaut.  La virtuosité de la danse de Camille Mutel ne suffit pas à nous convaincre dans cette pièce à la théâtralité grossière. A noter que cette pièce a reçu un accueil très favorable de la majorité du public. 

Anticorpo se présente comme «  une écriture qui se réfère à la nature humaine ». 

Si le facteur lieu de l’évènement est une considération majeure du spectacle de danse, la présence de l’interprète n’en est pas moins un agent nécessaire et indispensable. C’est à la difficulté de la mise en corrélation des ces éléments  que le chorégraphe scénographe et interprète João Costa s’est confronté dans la pièce Anticorpo présentée sur une imposante salle de spectacle. Ici, le lieu fait partie intégrante de l’effet, le titre de la pièce nous en livre le sujet et, c’est de manière très plastique que João Costa construit un espace mental qui se confond avec une architecture minimaliste du plateau tel une installation de Bruce Nauman ou de Sarkis. L’activation du lieu comme support de création à la figure concrète du microscope.  Le grossissement d’un corps (anticorps) ne nous apparaît pas de manière rationaliste,  mais comme une fabrique d’illusion où se déploie toute la puissance de la création lumière, technique comme source d’émancipation où le regard ne se présente plus comme un sens efficace et définit.  La contrainte de la danse consiste alors dans l’occupation de cet espace immédiat que le chorégraphe va investir en l’habitant totalement de manière physique et plastique dans une série de manipulations et de déplacements  à l’énergie mesurée. C’est une esthétique flottante où l’imaginaire du spectateur se   pose  sur une gestuelle qui se révèle aussi du cognitif et est capable de véhiculer des concepts proches du langage poétique.
Certes la danse de João Costa ne cherche pas à séduire et ne  tend pas vers le divertissement ni la virtuosité, le public ne s’y trompe pas et même si les manifestations d’ennui et de désapprobation à cette « absence » de danse parcourent la salle (de grâce manifestez vous après le spectacle mais respectez le travail de l’interprète et  l’attention des spectateurs sensibles à leur propos). La description de cet état de danse est plus  suggérée par ce que Merleau-Ponty analyse dans « l’Œil et l’Esprit » : 
[…où la présence de choses se donne sur fond d’absence, où s’échange l’être et l’apparence…] 
Que clairement exposée dans une chorégraphie à la partition trop écrite et caricaturale du geste. 
On touche alors des zones infraphysiques et métaphysiques, la danse n’y est pas uniquement ce qui se voit mais aussi ce qui se vit d’abord à l’intérieur du danseur. A suivre Réflexions à venir :  La technique au service du plateau Variations Anthropologie de la danse  Programme de salle,  

 

[1] Philippe Verrièle, «  Penser l’émergence ou solder sa crise d’adolescence » PSO infos n°5 Février 2009. [2] Nous vous recommandons l’écoute de Radio Campus qui a réalisé une série d’interview sur ce festival    http://www.ondesdechine.fr/reperages_2010.htm [3] Article en cours de rédaction. [4] la programmation audacieuse  de Caroline Saulnier pour l’Opéra de Lille est atypique et remarquable en ce domaine. 

 

 

[5]Ce sujet mérite un article « de fond », bienvenu à qui aurait l’envie de partager cette rédaction.

[6] SYMPHONIE POUR UNE DISSOLUTION – Camille Mutel Repéré par le Trois C-L (Luxembourg) Conception et interprétation : Camille Mutel Création lumière : Marie Drach, Brice Durand Musique : 1st version : Musique de scène, Marco Pujol ; 2e version : La Perle et l’oubli, CD, Gilles Gobeil 

[7] PORTUGAL ANTICORPO – João Costa Repéré par le Balleteatro Auditorio (Portugal) Direction artistique, conception et interprétation : João Costa Créateur lumière : Wilma Moutinho Assistant dramaturgique : Micaela Maia Scénographie : so.lu  Créateur son : lupeca 

 

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